Avec Laurent BOCQUET, GLOOMY GHERKIN décide en 1991 de passer à l’anglais et d’intégrer quelques nouvelles influences, le groupe devient alors SPASMOPHILIUS. Le Thrash, et même quelques influences Death Metal s’immiscent dans le Heavy du combo. La décision est prise d’intégrer des parties de chant de ce qu’on appellera plus tard « growls » à la voix de Bill. A l’époque, ce mélange était inédit et ne manque pas de surprendre.
« intramurock vol1 » sort en 1992. Il s’agit d’une compilation régionale à « gros tirage ». Une première expérience dans un gros studio pour SPASMOPHILIUS. Les deux titres sont enregistrés en deux jours !
La reformation d’un des trois groupes phare du Hard Rock français du tout début des années 80 (ndlr : TRUST, OCEAN, WARNING) est en soit un événement et une prise de risque considérable pour les interessés. Mais ressortir un nouvel album, 35 ans après avoir sorti un des LPs les plus emblématiques de son époque, l’album « Ocean » de 1981 (dit aussi « Album Londres »), celui-là même pour lequel le terme NWOFHM a été inventé, avait tout d’une mission impossible voire d’une mission suicide.C’est pourtant le défi qu’ont décidé de relever les quatre parisiens d’OCEAN avec ce nouvel opus, « C’est la fin … », dont le titre aura fait couler beaucoup d’encre dans la presse Rock et Metal.Afin d’alléger cette chronique, je passerai sur l’histoire du groupe, que vous pouvez consulter ICI ;-).
Premier contact avec cette nouvelle galette, la pochette et le packaging, on reconnaît les codes de la période Barclay, une photo du quatuor et un thème. Le choix du noir et blanc confère à l’objet un côté à la fois rock, collector et intemporel. Un bel objet, conjuguant qualité et esthétique, auquel je ne reprocherais que deux choses : sa relative fragilité (comme tous les digipacks) et le manque de contraste entre les textes et le fond qui rendent ceux-ci difficiles à lire pour mes yeux de vieux hardos.
Mais comme disent les anglophones « don’t judge a book by his cover », je place donc le CD dans mon lecteur et prend dès les premières notes de « La haine » une première baffe, du genre modèle pour adulte, la patte OCEAN est immédiatement reconnaissable et n’a pas molli avec le temps. De la façon de concevoir le duo basse/batterie aux breaks, en passant par la guitare solo qui tapent exactement là où ça fait mal … tout y est ! Ce titre aurait pu être une piste oubliée de l’album « Londres » (« Ocean » 1981).
La voix de Stef REB, bien que différente de celle de Robert BELMONTE, partage la même rage, la même puissance liée à un sens imparable de la mélodie.
L’album se découvre comme un bon film dont chaque chanson représenterait une scène, véhiculant ses propres rythmes et ses émotions. Les évolutions vocales de Stef sont d’ailleurs un fil directeur avec ce premier titre très proche de l’OCEAN de 1981 dont le chant reste très inspiré par celui de son prédécesseur, puis la révélation progressive d’une signature vocale personnelle qui prend de l’importance tout au long de l’album pour donner sa pleine mesure sur « c’est la fin … », véritable chef d’œuvre mêlant technicité, feeling et puissance.
L’agencement des titres ne laisse donc rien au hasard et forme une histoire qui trouve ses échos dans notre quotidien, « La haine », les « désillusions », l’égocentrisme, la quête de soi, la perte de repère, le sexe, la mort et le rock n’ roll … et la fin d’une époque dont nous sommes à la fois les acteurs et les spectateurs.
Ces nouvelles compositions de Georges BODOSSIAN n’ont rien à envier aux grands classiques du groupe, chaque écoute révèle de nouveaux détails, des variations subtiles entre deux couplets … même en ayant fait tourner l’album en boucle avant d’aborder cette chronique je n’ai eu à aucun moment envie de zapper un titre.
Chaque musicien fait preuve d’une réelle virtuosité mise au service des compositions, chaque prouesse technique est d’autant plus efficace qu’elle est discrète et redoutablement précise, aucun plan inutilement démonstratif ne vient polluer les compositions. Les arrangements sont superbes et le son est, de loin, ce que j’ai entendu de plus abouti en Hard et Metal Français ces dernières années.
A noter les superbes interventions de DIABOLO à l’harmonica sur « Rouge Lézard » et « Je crois que tu aimes ça »).
Les textes sont à la hauteur de la musique, bien ciselés et efficaces. J’apprécie tout particulièrement les textes d’Alain GOUILLARD, Batteur du Combo, mélant classe et irrévérence, dotés d’une imagerie verbale qui fait mouche (« Tu n’pense qu’à ta gueule » est un modèle du genre) et jouant d’une provoc’ au second degré qui manque au paysage Rock hexagonal actuel.
Avec « C’est la fin … », OCEAN a su éviter tous les pièges d’un album de reformation, on retrouve certes tous les éléments qui ont fait le succès du groupe (et ouvert la porte à ce que beaucoup considèrent comme l’age d’or du Hard Rock français), mais sans que ceux-ci imposent une limite à l’originalité des nouveaux titres.
Là où certains groupes se complaisent à multiplier la production d’albums baclés, persuadés que leur « talent » est magnifié par l’urgence, OCEAN s’est au contraire laissé le temps, celui de créer plutôt que de s’auto-plagier, de garder sa marque de fabrique tout en se renouvelant, celui d’enregistrer « à l’ancienne », en soignant chaque étape, une musique qui ne sonne pas datée et, surtout, celui de rester « fidèle à son nom ».
Dans un monde changeant où les échelles de valeurs se réduisent à peu de choses, malgré « la mort qui rode autour de nous », malgré la fin de nos idoles et d’une époque, OCEAN remporte son défi haut la main avec ce nouvel opus qui s’avère non seulement un digne successeur de l’album « Ocean » de 1981 mais surtout un album indispensable à toute bonne discothèque Rock, Hard & Heavy francophone.
« C’est la fin » est également disponible en Vinyle en édition limitée et numérotée. Le soin apporté à l’ensemble est exceptionnel et mérite d’être souligné. L’adoption d’un format double LP et un mastering spécifique au support garantit une qualité optimale du son, le grammage choisi, la finition de la pochette (double évidemment), des ronds centraux, la qualité des photos insérées en bonus … Tout en fait une pièce de collection à acquérir de toute urgence pour tout amateur de beaux vinyles ! … si il en reste encore lorsque vous lirez cette chronique.
Tracklist
01 – La Haine 02 – Desillusions 03 – Tu n’pense qu’à ta gueule 04 – Fidèle à son nom 05 – Rouge Lézard 06 – T’as rien trouvé 07 – Instinct animal 08 – Je crois que tu aimes ça 09 – La Mort rôde autour de nous 10 – C’est la fin